Aya de Yopougon (1), Marguerite Abouet & Clément Oubrerie

« Dans les années 1970, la vie était douce en Côte d'Ivoire. Il y avait du travail, les hôpitaux étaient équipés et l'école était obligatoire. J'ai eu la chance de connaître cette époque insouciante, où les jeunes n'avaient pas à choisir leur camp trop vite, et ne se préoccupaient que de la vie courante: les études, les parents, les amours… Et c'est cela que je veux raconter dans Aya, une Afrique sans les clichés de la guerre et de la famine, cette Afrique qui subsiste malgré tout car, comme on dit chez nous, ‘la vie continue...» (M.Abouet)

J'ai aimé !

Aya a 19 ans et vit dans le quartier populaire Yopougon surnommé Yop City, en Côte d’Ivoire. Très studieuse, elle rêve de faire de longues études, au désespoir de son père qui aimerait juste qu'elle trouve un bon mari. Mais Aya ne veut pas faire partie de ce qu'elle nomme la série C : "Coiffure, Couture, Chasse au mari". Heureusement, pour la distraire de son quotidien, Aya peut compter sur ses deux meilleures amies, Bintou et Adjoua qui passent leur temps à sortie en douce pour aller gazer...

Ce premier tome d'Aya m'a été offert par Riz-Deux-ZzZ lors de notre extraordinaire swap "Tissons des liens". Moi qui aime d'amour l'Afrique, sa littérature et son indéfectible optimisme, j'avais hâte de découvrir cette histoire qui a rencontré un succès fou dès sa sortie. C'est désormais chose faite, et je suis plutôt convaincue par Marguerite Abouet et Clément Oubrerie ! Le duo s'allie pour nous livrer une chronique d'Afrique pleine d'humour et de saveur. J'ai beaucoup apprécié la façon dont les petites histoires de chacun s'entremêlent et créent un vaste patchwork d'émotions ; on se laisse vite séduire par les tranches de vie d'Aya et de ses deux amies malgré leur apparente banalité. Je regrette en revanche le rythme assez lent et inégal de la narration...

Marguerite Abouet a souhaité montrer une autre facette de son continent : celle d'une Afrique que la jeunesse entraîne dans des rythmes endiablés jusqu'au lever du jour, celle d'une Afrique où, malgré les flagrantes disparités sociales et économiques, on sait aussi rigoler et prendre du bon temps. Mais même avec humour, l'auteure n'en oublie aborde pas moins des thèmes encore très actuels et dépeint avec finesse les paradoxes son pays : mariages arrangés, accès difficile aux soins ou à l'éducation... Je ne peux m'empêcher ici de faire une comparaison entre la littérature africaine et la littérature allemande, toutes deux très marquées par des évènements extrêmement durs ; mais là où les allemands font preuve d'une tristesse et d'un accablement éprouvants, l'Afrique possède cette indicible joie de vivre qui imprègne même les coups durs. Point de complaisance dans le malheur mais une philosophie résolument optimiste et tournée vers l'avenir.

Nul besoin de creuser profond pour voir qu'Aya est bien plus qu'une histoire de cœur(s), plutôt bien servie par le trait naïf, expressif et ondulant de Clément Oubrerie, même si je ne suis pas totalement fan de cet univers graphique. Je rajouterais un petit point bonus pour le langage très imagé et croustillant ainsi que le carnet de notes en fin d'ouvrage qui apporte de nombreux éclaircissements sur la culture ivoirienne.

Aya de Yopougon (1), Marguerite Abouet & Clément Oubrerie

Éditeur : Gallimard
Collection : Bayou

Paru en 2005

96 pages

17 €
Série finie (6 tomes)

ISBN 2-07-057311-7

Prix du premier album, Angoulême 2006

13/20

K.BD

Mo'