Jeune homme fortuné, Colin est tourmenté par son célibat. Jusqu’au jour où il rencontre Chloé, la femme de sa vie. Le bonheur est à portée de main. Mais il ne saurait durer. Chloé d’ailleurs toussote. Diagnostic : dans son poumon pousse un nénuphar, que Colin s’épuise à soigner. Mais rien n’y fait. Son état s’aggrave, si bien que leur maison rapetisse, se délabre. Tout devient étriqué, étouffant.
J'ai aimé !
L'histoire originelle bien présente à l'esprit, c'est avec beaucoup de curiosité mais également d'appréhension que je me suis plongée dans cette adaptation de Jean-David Morvan, qui vient tout juste de récidiver avec un autre texte phare de l'écrivain, L'Arrache-cœur (paru le 19/09/12 chez Delcourt). Je suis en effet restée la plupart du temps de marbre face à la poésie décalée de Vian, et je craignais que cette bande-dessinée ne fasse qu'appuyer ce sentiment.
C'est donc avec une surprise non feinte que j'ai constaté qu'il n'en était rien ; au contraire, cette adaptation éclaire d'un jour nouveau le texte de Boris Vian et séduira sûrement davantage ceux que le roman du maître a laissé sceptiques. Cette bande dessinée est pour moi l'exemple parfait du rôle des images dans la compréhension d'un texte. Je ne peux m'empêcher de faire la comparaison avec La cantatrice chauve de Ionesco, œuvre à laquelle je suis totalement hermétique, exceptée lorsqu'elle est jouée. Le théâtre, comme la bande dessinée, est un support qui permet une grande liberté d'interprétation et c'est pourquoi je crois y être plus sensible et réceptive. Peut-être est-ce parce que L'écume des jours est finalement un récit très visuel, construit sur des sensations, des images et des métaphores, que je trouve qu'on ne pouvait rêver mieux qu'une adaptation en bande dessinée.
Le travail d'adaptation de Jean-David Morvan est à la fois léger et rigoureux : les textes sont extrêmement fidèles à l'original et les illustrations de Marion Mousse prennent habilement le relais lorsque certains passages ne peuvent être transposés en dialogues. L'écume des jours frappe par cette adéquation entre le texte et l'image, qui traduit un minutieux travail sur la construction et le rythme du récit de Vian.
J'ai été charmée par le trait élastique et moelleux de Marion Mousse, que je découvre avec cet album. L'atmosphère fantasque ainsi créée correspond parfaitement à l'image que je me faisais de l'univers onirique et surréaliste instauré par Vian. J'ai également apprécié les cadrages audacieux et la mise en page qui alterne découpage classique et planches plus libres où les illustrations se mêlent et prennent appui les unes sur les autres. En revanche, on ne peut que regretter l'usage du noir et blanc, certes parfaitement maîtrisé, pour un texte où la couleur tient une place prépondérante. Peut-être que ce parti pris graphique était destiné à éviter l'effet "arc-en-ciel" qui aurait immanquablement surgi mais j'imaginais sans mal quelques touches très colorées afin de rehausser ces très belles planches, un peu à la façon de Blast de Manu Larcenet ou de Sin City de Frank Miller.
L'écume des jours, adaptation de Jean-David Morvan & Marion Mousse d'après l'œuvre de Boris Vian
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
Paru en 2012
165 pages
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