Le jeune garçon aimerait bien pouvoir se cacher, disparaître, lorsque son père, instituteur respecté, se déguise en clown amateur. Entre honte et mépris, il assiste à ses numéros. Jusqu'au jour où son oncle Gaston lui révèle le sens de cette étrange vocation en lui dévoilant un épisode tragi-comique de la Seconde Guerre mondiale...
Waouh !
Lorsqu'il a fallu choisir un lecture pour la lettre Q, ce court roman s'est aussitôt imposé à mon esprit. Cela faisait longtemps que je souhaitais découvrir l'écriture de Michel Quint, sur laquelle j'ai vu passer des commentaires aussi acides que dithyrambiques. Je sais que cet ouvrage a été souvent imposé dans le cadre de lectures scolaires, et je comprends que cela ait pu en décourager, voire en dégoûter certains. Personnellement, je pense que j'aurais beaucoup aimé l'étudier en profondeur car il m'a été donné très peu de fois l'occasion de lire un texte aussi court et puissant sur un sujet tellement vu et revu.
Ce bref récit est en fait double : l'un, fait de souvenirs d'enfance, est celui du narrateur, l'autre est le témoignage de Gaston, introduit par ces quelques mots :
Ce bref récit est en fait double : l'un, fait de souvenirs d'enfance, est celui du narrateur, l'autre est le témoignage de Gaston, introduit par ces quelques mots :
Le cousin Gaston parlait patois. Un patois que je comprenais parfaitement mais quand il m'a raconté, là, sur ce formica tout fendillé, le pourquoi des fêlures de mon père, il s'est appliqué. L'exact de ses mots, ses barbarismes, j'ai presque oublié. J'ai réécrit. Et, sauf des expressions, des passages que j'ai encore dans l'oreille, j'ai fini par oublier la chair de cette langue, que Gaston faisait pas semblant, que ses mots étaient pas l'ombre des choses et des moments inhumains, mais qu'il m'ouvrait sa vie et m'offrait humblement tout ce qu'il avait, d'effroyables jardins, dévastés, sanglants, cruels.
C'est ce témoignage bouleversant, à la fois tragique et comique, qui marquera à jamais la vie du narrateur et lui fera reconsidérer les clowneries de son père avec un regard neuf. Écrit dans un style argotique très particulier, pas toujours facile d'accès, ce récit possède une force et une justesse incroyables.
Que je te dise : la résistance, on s'y est mis, les autres je sais pas, en tout cas ton père et moi pour rigoler, pas s'emmerder, en tout cas au début... Comme si on serait allés au bal... La fine ambiance Horst Wessel Lied, fanfare militaire, ça nous donnait pas l'envie de danser. Alors, histoire de jouer notre propre musique, le sabotage du transfo de la gare de Douai, ton père et moi, on l'a fait aérien, façon musette, doigts de fée sur le piano à bretelles et allegretto.
Dans quelle mesure ce bref récit est-il autobiographique ? C'est une question que je me suis posée tout au long de cette lecture, car Michel Quint dédie son ouvrage à son père et son grand-père, respectivement ancien combattant et ancien résistant. C'est en tout cas un magnifique hommage, traversé par des thèmes universels et intemporels qui ne manqueront pas de vous secouer. Que l'on aime ou pas, Effroyables Jardins est incontestablement une œuvre marquante, à garder dans sa bibliothèque.
Effroyables Jardins, Michel Quint
Éditeur : Gallimard
Collection : Folio
Paru en 2004
75 pages
4.80 €
Je suis tout à fait d'accord avec toi. D'une manière ou d'une autre, ce récit est poignant... Impossible d'en sortir indemne, à mon avis!
RépondreSupprimerIl est dans ma PAL depuis des lustres... Je note de le faire remonter un peu dans la pile :p
RépondreSupprimerUn roman que j'avais beaucoup aimé. Le film également.
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